Madeleine Delbrêl
L’Evangile au coin de la rue
(2ème partie)
|
CONFERENCE DE MGR CLAUDE
DAGENS
-
Présentation et remerciements
-
Début
- La vie et la passion de
Madeleine DELBREL
- Quelques
passages dans "Nous autres, gens des rues"
Présentation
et remerciements
A
l'occasion de la restauration du Centre Paroissial Madeleine
Delbrêl à Soyaux, dans la banlieue
d'Angoulème, Monseigneur Claude Dagens a fait une
conférence sur la vie de Madeleine Delbrêl,
"soulignant les lignes de forces de sa spiritualité
missionnaire". Le texte qui suit m'a été
communiqué par Laetitia Thomas, journaliste,
rédactrice départementale du Courrier
Français, édition Charente. Je la remercie
pour sa gentillesse et l'aide qu'elle m'a apportée.
Madeleine Delbrêl
(1904-1964)
J'éprouve beaucoup de joie
d'être avec vous à Soyaux pour
redécouvrir Madeleine DELBREL, à laquelle ce
centre paroissial est consacré.
Madeleine
Delbrêl, assistante social à Ivry,
c'est-à-dire dans la banlieue communiste de Paris, en
pleine période du marxisme triomphant, a écrit
un livre programme: "Villes marxistes, terre de
mission". On peut dire aussi, dans cette
périphérie d'Angoulème, non pas "ville
marxiste", mais "ville nouvelle, terre de mission",
c'est-à-dire d'amitié et
d'évangélisation".
Pour
comprendre cela, je vous raconterai la vie de Madeleine
Delbrêl, en soulignant les lignes de force de sa
spiritualité missionnaire. (cf Missionnaires sans
bateau, Paris, 2000).
LA VIE ET LA PASSION
DE MADELEINE DELBREL
1. La genèse et la foi.
Avant tout
une femme passionnée: passionnée de vivre,
passionnée d'aimer, passionnée du Christ et de
l'Evangile.
- Née
en 1904 à Mussidan (Dordogne).
- Des
parents très différents: un père
cheminot, qui finira chef de gare à Paris, gare de
Sceaux, très éloigné de l'Eglise et
aussi très cultivé, une mère
très douce, effacée, croyante. Et les parents
se sépareront alors que Madeleine a plus de 20 ans ,
et elle leur restera toujours fidèle.
- Elle a
reçu une première initiation
chrétienne. Elle a fait sa communion solennelle. Et
puis vers 15 ans, elle est devenue farouchement
athée. A l'âge de l'adolescence, vers 1920,
elle écrira un poème " Vive la
mort".
|
- Elle a été
témoin de la guerre et des souffrances de la
guerre.
-
La voilà étudiuante à Paris:
elle se passionne pour la philosophie, elle fait du
piano, elle écrite des poèmes, elle a
des amis, graçons et filles. Et elle sera
amoureuse d'un jeune bordelais, nommé Jean
MAYDIEU, qui choisit d edevenir dominicain, et qui
sera un des grands animatuers des Revues
dominicaines des années 30, les
années du renouveau catholique
(Sept, La vie
intellectuelle).
|
-
Finalement, vers les années 30, Madeleine
delbrêl se livre à la prière: "Je ne
pouvais pas laisser Dieu dans l'abandon". Et elle est
ressaisie par Dieu, passionnément, grâce
à l'influence d'un prêtre qui sera son
conseiller jusqu'à la mort, l'allé LORENZO,
futur curé d'Ivry, alors curé de St Dominique,
où elle devient cheftaine scoute.
- Elle a
fait des études d'assistante sociale, et avec deux de
ses amies, elle va s'installer en 1933 à Ivry,
où elle va vivre, travailler, témoigner durant
30 ans, jusqu'à sa mort en Octobre 1964.
2. Sa vocation à Ivry.
Ivry, c'est
d'abord pour elle la découverte du monde
ouvrier et du marxisme triophant.
- Monde
ouvrier: des dizaines d'usines aux portes de Paris, une
population déracinée, avec un très fort
chômage.
-
Communisme régnant depuis plusieurs
années, avec le maire Georges MARRANE, et son adjoint
, Venisce GOSNAT, qui vont devenir pour Madeleine des
adversaires et des amis.
- Car
très vite, Madeleine Delbrël est frappée
par l'absence et le silence de l'Eglise dans ce
monde nouveau.
* Des patrons chrétiens qui font
construire des églises mais qui ignorent les
rélités du monde ouvrier
* Des
communautés paroissiales repliées sur
elles-mêmes, avec une foi qu'elle juge
atrophiée, mutilée (elle parle de bras, sans
avant bras).
- Que faire?
Madeleine Delbrêl est simplement convaincue qu'il
doit être possible de vivre et d'annoncer l'Evangile
dans ce monde nouveau. A trois conditions:
1. Assimiler soi-même la foi et
l'Evangile, sans les édulcorer. On n'adapte pas
l'Evangile, on le vit, dans les mouvements de
société.
2. Consentir
à une certaine solitude, à une sorte de
"désert": le désert, ce sont les
rues. Et, dans ces rues, on rencontre et on contemple un
peuple en attente de salut.
3. Madeleine
Delbrêl croit à cette
évangélisation "en
épaisseur" (elle se réfère à
Thérèse de l'Enfant Jésus) qui fait que
les chrétiens s'enfoncent dans la vie ordinaire pour
y inscrire la force et la nouveauté de
l'Evangile.
Le plus
important dans cette évangélisation, c'est
son
caractère fraternel: on ne vient pas de
l'extérieur apporter quelque chose d'étranger
à l'humanité. On vient communiquer l'Amour de
Dieu avec le langage de la fraternité
(Cf.
Nous
autres, gens des rues p. 270-271)
3. Le combat missionnaire
|
Jusqu'à sa mort, au moment
où se déroule le Concile Vatican II,
Madeleine Delbrêl va participer
intensément au combat missionnaire
de l'Eglise.
-
D'abord elle a été liée
à toutes les initiatives missionnaires qui
marquent l'Eglise de France dans les années
40: en particulier la fondation de la Mission
de France et du Séminaire de la
Mission de France à Lisieux, avec le
Père AUGROS.
|
Et elle
restera si intimement liée à la Mission de
France qu'elle écrira à ses
responsablers en 1953, au moment de la crise des
prêtres ouvriers, pour dire: " Attention! Attention à
ne pas se laisser posséder par les marxistes qui
vivent certainement quelque chose de l'Evangile, mais qui
vivent aussi consciemment sans
Dieu, et ce refus de Dieu est une mutilation de
l'être humain. Un chrétien missionnaire ne peut
accepter cette mutilation."
- Mais, en
même temps, Madeleine Delbrêl a souffert des
étroitesses et des rigidités de l'Eglise, qui
ne comprend pas la nouveauté du monde ouvrier et qui
se tient à l'écart de lui. Et il dit sa
souffrance. Et elle va s'expliquer avec les responsables de
l'Eglise au plus haut niveau.
A Paris,
dans les années 45-49, avec le Cardinal SUHARD, qui,
lui, avait compris ces expériences nouvelles.
Puis, en
1952, au moment de l'inerdiction des prêtres ouvriers,
elle va prier à St Pierre de Rome, entre 2 trains,
pour que "la grâce de l'apostolat soit gardée
à l'Eglise de France".
Elle ira
jusqu'à rencontrer Pie XII, et surtout un proche
collaborateur de Pie XII, Mgr Pierre VEUILLOT, qui
deviendra, à la mort du Père LORENZO, le
conseiller du groupe des amies de Madeleine Delbrêl.
Et l'on sait que Mgr VEUILLOT succèdera au Cardinal
FELTIN à Paris.
- Un autre
évènement a beaucoup marqué Madeleine
Delbrêl,: l'élection de Jean XXIII en 1958, et
le nouveau style du pape, fait de simplicité et de
bonté.
Et
bientôt le projet de Concile: et Madeleine
Delbrêl a été consultée alors par
Mgr VEUILLOT et par d'autres pour parler de
l'athéisme et de l'évangélisation du
monde athée.
Et c'est de
cette époque que vient cette étude magnifique
où l'on trouve les convictions les plus radicales au
sujet de l'évangélisation.
* Critique de la
naturalisation, de l'affaiblissement de la
foi
- p. 253
*
Appel à une foi
militante, et non
encasernée - p. 255
*
La
vérité de
l'évangélisation - p. 256
*
Le langage de la
bonté - p 271
Quelques passages dans "Nous
autres, gens des rues"
Critique de la
naturalisation, de l'affaiblissement de la foi - p.
253
" Dans les
milieux où les chrétiens vivent entre eux
depuis des générations, une confusion a fini
par se produire entre la foi et une mentalité
chrétienne. Dans cette mentalité, le don
gratuit de Dieu, don de connaître ce qu'il est, don
d'agir comme il veut, don de la vie créée et
de la vie éternelle, don de la création et de
l'Incarnation rédemptrice, est devenue une sorte de
propriété innée du chrétien de
souche, le bien héréditaire des famille
chrétiennes.
Peu à
peu, le foi en Dieu, foi vivante en Dieu vivant, a
été confondue avec le bon sens, avec le bon
sens d'une croyance en Dieu. Peu à peu les vertus de
l'Evangile sont devenues puis ont été
confondues avec les vertus de l'honnête homme"
Appel à une
foi militante, et non encasernée - p. 255
" Car quand
la foi est la foi, elle tient. Elle tient, mais en
souffrant, en combattant. Comme l'Eglise de la terre, elle
est par état "militante". Dans les milieux
anciennement chrétiens, nous nous étions
habitués à vivre l'Eglise militante "en
caserne".Le contact des athéismes nous amène
au combat, le combat qui éprouve, le combat qui
réclame des forces , en particulier la force de
souffrir, souffrir la souffrance même de la
Rédemption: la tentation. Mais, pour se battre, il
faut être en bonne santé."
La
vérité de l'évangélisation - p.
256
"L'évangélisation est et sera
toujours annoncer une Bonne Nouvelle. L'Evangile est une
nouvelle pourtout homme car il est révélation
de ce que tout homme ne peut savoir si Dieu ne le lui dit
pas. Mais, dans les milieux athées, cette nouvelle
surnaturelle doit être accompagnée,
doublée d'une nouvelle naturelle, une nouvelle que
les hommes devraient connaître et ne connaîssent
plus: Dieu est - et il est Dieu.
Une bonne
nouvelle change dans une vie le niveau du bonheur, et cette
nouvelle bonne doit être annoncée par un
informateur qui est présent , qu'on peut entendre,
qui aprle la langue de ses auditeurs, qui parle le langage
du Christ, qui est le chemin d'un fait actuel et vrai, qui
est digne de foi, crédible parce que véridique
dans le reste de sa vie."
" Nous
défendons Dieu comme notre propriété,
nous ne l'annonçons pas comme la vie de toute vie, le
prochain immédiat de tout ce qui vit. Nous ne sommes
pas les informateurs de la nouveauté éternelle
de Dieu, mais des polémistes défendant une
vision de la vie à faire durer. Aussi, serait-il
inutiile d'être assez proches pour être
entendus, de parler la langue de nos semblables , de leur
être présents et existants si , toutes ces
conditions étant remplies, nousn'avions pas
retrouvé nous-mêmes le message total que nous
avons reçu et que nous avons à
transmettre."
Le langage de la
bonté - p. 271
"
Près d'un incroyant, la charité devient
évangalisation, mais cette
évangélisation ne peut être que
fraternelle. Nous ne venosn pas offrir de partager
généreusement ce qui serait à nous,
c'est-à-dire Dieu. Nous ne venons pas comme des
justes parmi des pécheurs, comme des gens qui ont
conquis des diplômes parmi des gens incultes; nous
venons parler d'un Père commun, connu des uns,
ignoré des autres; comme des pardonnés, non
comme des innocents; comme des gens qui ont eu la chance
d'être appelés à croire, à
recevoir la foi, mais de la recevoir comme un bien qui n'est
pas à nous, qui est déposé en nous pour
le monde: de cela découle toute une façon
d'être.
SEUL EST
FRATERNEL UN COEUR CONVERTI.
L'Evangile
n'est annoncé vraiment que si
l'évangélisation reproduit entre le
chrétien et les autres le coeur à coeur du
chrétien avec le Christ de l'Evangile. Mais rien au
monde ne nous donnera la bonté du Christ sinon le
Christ lui-même.Rien au monde ne nous donnera
l'accès au coeur de notre prochain sinon le fait
d'avoir donné au Christ l'accès au
nôtre."
- Jean Debruynne
raconte...
- Textes de Madeleine
Delbrêl